samedi 22 décembre 2007

money & mitre


Réveil aux premières heures du matin par une reprise à coing de Money, dans une interprétation qui, avec tout mon respect, tient plus d'une répétition de la fanfare du cirque Knie sur le déclin que d'une expérience psychotique. Angoisse du samedi: quelques achats à faire sur le bord d'une avenue marchande; l'empressement des fêtes que personne n'évite; un rendez-vous dans un quartier éloigné et rupin, une sorte de Carouge qui aurait mené à bien sa laborieuse ascension vers l'eldorado du quartier branché. Rendez-vous manqué, ou plutôt, absurdement circonstanciel: A. me parle la couleur des murs de la cuisine de son nouvel appartement, du dernier livre de M. Ayra qu'il faut m'empresser d'acheter, de ses bottines, de son salaire, de l'actualité théâtrale. Je ne sais pas endiguer ce catalogue envahissant de fin d'année, je ne sais pas parler à A., je finis par regarder la décoration du bar. Charmante.
Je n'ai pas d'argent avec moi, A. m'invite, me tend un chewing-gum et me plante au milieu du trottoir pour rejoindre un autre rendez-vous. Je pense à Bresson, ou plutôt non, je pense à Bartolomé Mitre que la caissière du métro me rend avec quelques piecettes, Mitre qu'elle me rend atrocement mutilé, marqué d'un "traidor" sur le front, comme s'il s'agissait d'un bagnard ou d'un pestiféré ou d'un criminel, je pense à l'honneur souillé de ce pauvre Mitre et à la collection de rendez-vous de A., je pense à l'odeur de Mitre, au Noël de A., aux pauvres Pink Floyd déshonorés par la fanfare du cirque Knie, je pense à mes poches qui sont vides, à mes retrouvailles avec A., à son départ, à A., à la caissière qui m'a livré Mitre dans cet état et au moribond étendu sur le sol du métro, au moribond qui, littéralement, rend l'âme à quelques mètres de moi, de nous tous, dans une flaque de vin en brique. Puis je pense à nouveau à Noël. Qui trahit? Qui a trahi?

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